Mort de l’écrivaine guadeloupéenne Maryse Condé, plume de la fierté noire
Des Antilles à l’Afrique, la romancière guadeloupéenne, révélée en France avec sa saga «Ségou» et couronnée en 2018 d’un «prix Nobel alternatif», a questionné au fil d’une œuvre foisonnante et puissante la question de l’identité de part et d’autre de l’Atlantique. Elle est morte dans la nuit du lundi 1er au mardi 2 avril, à 90 ans.
Maryse Condé, en 2013.
C’était un après-midi de juillet 2017, à Gordes, dans le Vaucluse. Là où Maryse Condé affirmait s’être retirée. Là où elle semblait à l’abri du bruit du monde alors même qu’elle restait à l’affût de ses moindres soubresauts. Sous l’œil bienveillant de son époux, l’éditeur Richard Philcox, et cherchant à humer le parfum de l’ylang-ylang
– sa madeleine de Proust –, elle y composait avec la maladie dégénérative qui l’affectait. Elle n’en avait pas moins toujours l’œil vif. Lui s’affairait en cuisine en suivant ses directives (pour Maryse Condé, cuisine et littérature étaient deux arts du même ordre) ; elle, avait tant à dire. Elle confiera ce jour-là regretter de ne pas avoir appris une seule langue africaine, répétant que le continent africain lui avait apporté «la fierté d’être noire». Et durant qu’elle parlait, une chose nous a sauté aux yeux. Malgré une condition physique allant de mal en pis, Maryse Condé en imposait. Par sa façon de continuer à habiter le présent et le monde. Par sa profonde humanité révélée par son «babillage» et cette tendresse douce-amère tout antillaise (elle ne nous aura pas parlé créole mais c’était tout comme). Et elle en imposait enfin par sa manière de marteler ses convictions de façon nette et tranchante – malgré une voix fragile –, de se livrer, de se mettre à nu, sans ambages ni contritions, tout en jonglant avec les para