Plus de 10.000 victimes ou parents de victimes de l’ex-dictateur tchadien Hissène Habré ont commencé à recevoir, huit ans après sa condamnation à perpétuité pour crimes contre l’Humanité, une indemnisation du gouvernement, ont annoncé mardi des ONG.
« Les paiements ont commencé le 23 février », indique la Commission internationale de juristes (cij) dans un communiqué, qui précise que l’indemnisation de 10 milliards de FCFA (environ 15,2 millions d’euros) est destinée aux « survivants des prisons et (aux) familles de ceux qui ont été tués sous Habré ».
L’ex-dictateur, renversé en 1990 au Tchad, est mort en prison à Dakar le 24 août 2021.
« Il y a environ 10.800 victimes, chacune a reçu 925.000 FCFA (1.410 euros). Nous avons fait un partage à part égale, victimes directes et indirectes ont reçu le même montant », a indiqué à l’AFP le président de l’Association des droits de l’Homme au Tchad, Djidda Oumar.
Ce montant ne représenterait toutefois qu’une « petite fraction de ce qui leur a été accordé par les tribunaux, et beaucoup, beaucoup moins que ce à quoi elles ont droit en vertu du droit international », déplore la cij.
Le communiqué rappelle notamment que la cour d’appel des Chambres africaines extraordinaires à Dakar, un tribunal spécial soutenu par l’Union africaine (UA) qui avait condamné Habré, avait accordé en avril 2017 82 milliards de francs CFA (125 millions d’euros) aux victimes.
Cette juridiction, qui avait confirmé la condamnation de Hissène Habré en 2017, avait aussi mandaté un fonds de l’UA pour dédommager les victimes à partir des biens de l’ancien dirigeant et de contributions volontaires.
Mais ce fonds n’est toujours pas opérationnel alors que beaucoup de victimes sont mortes sans rien toucher.
En mars 2015, la justice tchadienne avait déjà condamné 24 anciens agents de la police politique sous Habré, au versement de 75 milliards de FCFA, (114 millions d’euros) de dommages et intérêts aux victimes recensées, en ordonnant au gouvernement de payer la moitié de la somme et aux agents condamnés de payer l’autre.
Hissène Habré, qui a dirigé le Tchad de 1982 à 1990 et qui avait trouvé refuge au Sénégal après avoir été chassé du pouvoir, y avait été arrêté, inculpé et jugé par ce tribunal spécial.
Il avait été déclaré coupable de crimes contre l’Humanité, viols, exécutions, esclavage et enlèvements et condamné à la prison à vie à l’issue d’un procès sans précédent.
Une commission d’enquête tchadienne a chiffré à 40.000 morts le nombre des victimes de la répression sous le régime Habré.
L’ancien dictateur a purgé sa peine au Sénégal où il a succombé au Covid en août 2021 à l’âge de 79 ans et où il a été inhumé.