Création du Sénat au Bénin : rôles et missions

Le débat institutionnel s’anime à nouveau sur la scène politique nationale. Une proposition de loi portant création du Sénat vient d’être introduite à l’Assemblée nationale. Cette initiative, portée par des députés de la majorité, vise à doter le Bénin d’une chambre haute du Parlement, censée jouer un rôle d’arbitre, de gardien de la stabilité politique et de promoteur du consensus national.

Un contexte de polarisation politique

Selon les initiateurs de la proposition, la vie politique béninoise reste marquée par une opposition frontale entre les courants politiques, souvent au détriment des intérêts supérieurs de la Nation. Cette situation, estiment-ils, compromet les efforts de développement et freine la transformation structurelle du pays. « L’animation de la vie politique dans une perspective purement politicienne empêche tout compromis susceptible de favoriser la mise en œuvre de solutions consensuelles », souligne l’exposé des motifs de la proposition de loi.

Pour corriger cette dérive, les auteurs de la proposition jugent nécessaire de créer une institution capable de rapprocher les positions, d’arbitrer les divergences et de favoriser un climat politique apaisé.

Le Sénat, une chambre de sagesse et de stabilité

Dans cette optique, le futur Sénat serait appelé à jouer un rôle complémentaire à celui de l’Assemblée nationale. Il ne s’agirait pas d’une simple duplication, mais d’un organe doté d’une mission spécifique : garantir la stabilité politique et la continuité de l’État ; favoriser le débat contradictoire constructif entre les forces politiques ; promouvoir des mœurs politiques saines, axées sur la cohésion nationale et la paix sociale ; veiller à la bonne gouvernance, au respect des libertés publiques et à la gestion rigoureuse des biens publics.

Le Sénat aurait également pour prérogative de délibérer, en amont, sur tout projet ou proposition de loi à caractère politique, notamment celles liées à l’organisation du pouvoir d’État.

Un rôle législatif d’arbitrage

L’innovation majeure réside dans la possibilité offerte au Sénat de solliciter une seconde lecture de toute loi votée par l’Assemblée nationale (à l’exception des lois de finances). Dans ce cadre, si l’Assemblée nationale écarte les observations du Président de la République, le Sénat interviendrait en lecture définitive, jouant ainsi le rôle d’ultime instance d’équilibre et de modération dans le processus législatif.

Une composition fondée sur l’expérience

La composition du futur Sénat se distingue par son caractère élitiste et son ancrage dans l’expérience politique et institutionnelle. Les membres de droit seraient : les anciens présidents de la République, les anciens présidents de l’Assemblée nationale, les anciens présidents de la Cour constitutionnelle, ainsi que les chefs d’état-major des forces chargées de la défense et de la sécurité nationales.

À ces membres de droit s’ajouteraient des personnalités désignées : le Président de la République et le Président de l’Assemblée nationale pourraient chacun nommer un certain nombre de membres, dans une limite fixée à un cinquième du total des membres de droit.

Vers une réforme majeure du système institutionnel

Pour les promoteurs de cette proposition, le Sénat ne serait pas un organe de plus, mais une chambre politique de sagesse, destinée à renforcer la gouvernance démocratique et la continuité de l’État. L’objectif est clair : offrir au Bénin un espace de concertation et de réflexion au-dessus de la mêlée partisane, où l’expérience des anciens dirigeants servirait à préserver la stabilité nationale.

Cependant, des observateurs s’interrogent déjà sur la pertinence et la faisabilité d’une telle réforme. Entre la nécessité d’un équilibre institutionnel et le risque de multiplication des organes publics, le débat promet d’être animé dans les jours à venir.

Boris MAHOUTO

Partager
Suivre :
Administrateur Général Adjoint de Cloche media monde