Dans le cadre d’un partage d’expérience Sud-Sud sur les systèmes électoraux et l’implémentation de la biométrie, une délégation de haut niveau de la Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI) de Madagascar a été reçue en séance de travail à la Cour constitutionnelle du Bénin. La rencontre a permis des échanges nourris sur le rôle de la Cour constitutionnelle dans la supervision du fichier électoral biométrique béninois, un modèle salué dans la sous-région.
Conduite par le président de la CENI de Madagascar, M. Arsène Adrianarisedo, la délégation malgache est en mission au Bénin pour s’inspirer des bonnes pratiques en matière de biométrisation du fichier électoral. Cette visite s’inscrit dans le cadre d’un programme de travail annuel de la CENI malgache, à un moment où le pays se prépare à franchir une nouvelle étape dans la modernisation de son système électoral. Le choix du Bénin ne doit rien au hasard. Le pays a su, ces dernières années, s’imposer comme une référence dans la mise en place d’un fichier électoral biométrique fiable, soutenu par un cadre juridique rigoureux et des institutions crédibles.
La Cour constitutionnelle, garante de la régularité électorale
La séance de travail s’est tenue dans les locaux de la Cour constitutionnelle, en présence de plusieurs responsables de l’institution, notamment le Secrétaire général Romuald Irotori, le Directeur de la recherche et de la documentation Latif Sidi, et le Directeur de cabinet Clément Quenum. Dans son mot de bienvenue, Romuald Irotori a salué la démarche de la CENI malgache avant d’introduire les échanges : « Vous êtes ici chez vous. La Cour constitutionnelle joue un rôle central dans la surveillance de la régularité du processus électoral, en particulier à travers le contentieux de la liste électorale. Il est donc important de clarifier notre fonctionnement, en lien avec les textes qui encadrent ce processus. » La présentation a permis à la délégation malgache de mieux comprendre le mécanisme béninois fondé sur trois piliers juridiques : la Constitution, la loi organique de la Cour et le Code électoral. Ces textes confèrent à la Cour un rôle d’arbitre dans le contentieux électoral, notamment lorsqu’un citoyen s’estime indûment exclu de la liste électorale biométrique.
Du fichier général biométrique au fichier électoral
Le Directeur de la recherche et de la documentation, Latif Sidi, a retracé l’évolution du système béninois depuis l’époque des fichiers manuels jusqu’à l’instauration du registre national biométrique. « Le Bénin a entamé la biométrisation à partir de 2013, avec une base de données gérée par l’Agence Nationale d’Identification des Personnes (ANIP). Cette base n’est pas électorale à proprement parler, mais elle permet, en période électorale, d’en extraire un fichier électoral épuré, transmissible à la Commission Électorale Nationale Autonome (CENA), dans un délai légal de 90 jours avant les élections », a-t-il expliqué. Les éventuelles contestations de la part des citoyens sur cette liste électorale peuvent alors faire l’objet d’un contentieux porté devant la Cour constitutionnelle, qui veille à garantir l’inclusion, la transparence et la régularité du processus.
Un modèle qui inspire
Prenant la parole au nom de la délégation malgache, le président Arsène Adrianarisedo a exprimé sa gratitude et son admiration pour le cadre béninois : « Nous avons entamé à Madagascar une réflexion approfondie sur le basculement vers un fichier biométrique. Le Bénin, fort de son expérience et de ses succès dans ce domaine, constitue pour nous un modèle pertinent. Votre démarche juridique, la rigueur du processus, et l’implication de la Cour dans l’arbitrage électoral sont des éléments clés dont nous souhaitons nous inspirer. » Il a également précisé que cette mission s’inscrit dans une dynamique gouvernementale visant à renforcer l’identification des personnes et à fiabiliser le processus démocratique.
Une rencontre enrichissante, porteuse d’avenir
La séance a été marquée par des échanges techniques approfondis, des explications sur la répartition des compétences entre les institutions (ANIP, CENA, Cour constitutionnelle), ainsi que des exemples concrets de contentieux déjà arbitrés par la Cour. Clément Quenum, Directeur de cabinet de la Cour, a insisté sur la nécessité d’un cadre juridique clair : « Tout processus électoral solide repose d’abord sur des textes de loi cohérents. La pratique ne peut se construire sans cette base. La Cour n’intervient jamais dans l’abstrait : tout est encadré, balisé, et défini par les normes. » La visite de la CENI Madagascar à la Cour constitutionnelle du Bénin témoigne de la vitalité des échanges interinstitutionnels africains dans le domaine de la démocratie électorale. Elle ouvre la voie à une coopération technique renforcée entre les deux pays, pour le renforcement des processus électoraux crédibles et transparents sur le continent. Et pour immortaliser la séance, la délégation malgache a offert un cadeau symbole à la Cour constitutionnelle reçu par le secrétaire général de l’institution, Romuald Irotori. Accolades et photos de famille ont fin un terme aux échanges fructueux et instructifs.
Boris MAHOUTO