(Objectif : garantir la sécurité juridique des investissements et renforcer l’attractivité du projet tout en préservant les intérêts de l’État béninois)
Sous la présidence de Louis Gbèhounou Vlavonou, les députés de la 9ᵉ législature se sont réunis en séance plénière au palais des gouverneurs ce lundi. Parmi les dossiers majeurs à l’ordre du jour figure l’examen et l’adoption du projet de loi portant modification de la loi n° 2020-04 du 8 mai 2020, qui établit le régime juridique, fiscal et douanier du projet de pipeline d’exportation Niger-Bénin (PENB).
Le gouvernement, représenté à cette occasion par le Garde des Sceaux, Ministre de la Justice Yvon Détchénou, a soutenu l’initiative portée par l’exécutif comme un pas décisif vers une meilleure sécurisation des investissements dans ce projet structurant d’envergure sous-régionale.
Un cadre juridique ajusté pour protéger l’équilibre des engagements
Le pipeline Niger-Bénin, long de plus de 2 000 kilomètres, constitue l’un des projets phares de coopération économique entre les deux pays. Il permettra d’acheminer le pétrole nigérien jusqu’au terminal maritime de Sèmè-Podji, au Bénin, avec des retombées attendues sur le plan économique, fiscal et infrastructurel.
Mais pour que ces promesses se concrétisent dans la durée, la stabilité juridique du cadre d’investissement reste un enjeu crucial. C’est à ce titre que la modification législative a été soumise et adoptée. Elle concerne principalement l’article de la loi initiale encadrant l’impact des modifications législatives et réglementaires postérieures à la signature de l’Accord de Garantie de l’État (AGH).
Selon le nouveau dispositif voté par les députés, les changements de lois ou règlements postérieurs à la signature de l’accord n’affecteront les partenaires du projet qu’à des conditions spécifiques. En cas de préjudices identifiés — qu’il s’agisse de retards, pertes financières ou atteintes aux droits contractuels —, l’État béninois s’engage à mettre en œuvre des mesures compensatoires, incluant le versement d’indemnités, l’octroi d’avantages fiscaux ou les deux à la fois.
Des garde-fous pour préserver la souveraineté et l’équité
L’amendement précise également que cette protection s’applique aux conséquences juridiques des engagements internationaux pris par le Bénin qui viendraient à impacter directement les opérateurs du pipeline. Toutefois, un seuil minimum de préjudice fixé à un million de dollars américains est requis pour déclencher la responsabilité de l’État béninois.
Autre innovation introduite : la définition stricte des “normes sociales” dans le cadre du projet. Il est désormais précisé que les mesures sociales ou fiscales ne doivent pas cibler uniquement les opérateurs du pipeline à moins d’être d’application générale. Cela vise à éviter toute forme de discrimination législative ou réglementaire à l’encontre des entreprises parties au projet.
Une initiative saluée par les parlementaires, avec quelques réserves
La présentation du rapport de la Commission des finances, dirigée par l’honorable Gérard Gbénonchi, a suscité des réactions globalement positives de la part des députés présents. La majorité des intervenants ont salué l’initiative du gouvernement qui, selon eux, démontre sa volonté de rassurer les investisseurs tout en garantissant la transparence et la sécurité juridique.
Toutefois, certaines voix, à l’image de celle de l’honorable Hélène Olossoumaï, membre du groupe parlementaire Les Démocrates, ont exprimé des préoccupations. « Quelles seront les conséquences réelles pour l’État si des désaccords juridiques survenaient ? », a-t-elle interrogé, mettant en garde contre une possible asymétrie contractuelle au détriment des intérêts nationaux.
Le Ministre de la Justice, Yvon Détchénou, s’est voulu rassurant : « Toutes les parties prenantes au projet ont été associées à une concertation préalable. L’État béninois a veillé à préserver l’équilibre entre attractivité des investissements et souveraineté nationale. Les clauses de cette loi modifiée visent justement à éviter tout contentieux coûteux pour le pays. »
Un second dossier en suspens
Outre le projet de modification de la loi sur le pipeline, la plénière de ce 7 juillet a vu l’ouverture de l’examen d’un autre dossier important : la proposition de résolution portant modification du règlement intérieur de l’Assemblée nationale. Toutefois, les débats n’ont pas pu aller à leur terme et ont été reportés à une date ultérieure.
Avec l’adoption de cette modification législative, le Bénin ajuste son cadre juridique aux réalités d’un projet stratégique pour son avenir énergétique et économique, tout en affichant sa volonté de renforcer la confiance des investisseurs. Reste désormais à veiller à l’application rigoureuse de ces nouvelles dispositions et à maintenir l’équilibre entre ouverture économique et défense des intérêts nationaux.
Boris MAHOUTO