C’est une avancée historique pour la diaspora africaine et un tournant significatif dans la politique identitaire du Bénin. L’Assemblée nationale, sous la présidence de Louis Vlavonou, a adopté ce vendredi la loi n°2025-11, modifiant et complétant la loi n°2024-31 du 2 septembre 2024 relative à la reconnaissance de la nationalité béninoise aux Afro-descendants. Cette réforme ouvre désormais l’accès à la nationalité béninoise aux requérants établis hors du territoire national, une disposition attendue et saluée par de nombreuses organisations diasporiques.
La séance plénière a connu la participation remarquée du Garde des Sceaux, Ministre de la Justice et de la Législation, Yvon Détchénou, venu défendre un projet de loi porté par le Gouvernement et fondé sur des impératifs d’inclusion, de justice mémorielle et de gestion moderne des migrations.

Des barrières levées pour la diaspora
Jusqu’à présent, les requérants de nationalité béninoise par reconnaissance – notamment les Afro-descendants – devaient effectuer des démarches sur le sol béninois, condition souvent lourde de contraintes administratives, logistiques et financières. Avec cette réforme, le Bénin devient l’un des rares pays africains à permettre une procédure délocalisée d’accès à la nationalité, marquant ainsi sa volonté de renforcer les liens avec la diaspora noire issue de l’histoire de la traite négrière. La nouvelle loi modifie de façon substantielle les articles 8, 9, 12, 13 et 15 de la loi de 2024 et abroge l’article 11, qui imposait une présence physique préalable sur le territoire pour lancer la procédure.
Une procédure modernisée et encadrée
Désormais, tout requérant éligible pourra initier sa demande de reconnaissance depuis son pays de résidence. Une fois le dossier examiné favorablement, il obtiendra une attestation d’éligibilité valable trois ans, non renouvelable, lui garantissant une liberté d’entrée, de séjour et de sortie du territoire béninois pendant cette période.
La nationalité béninoise n’est formellement attribuée qu’après un séjour effectif sur le sol béninois, dans le délai imparti. Le bénéficiaire reçoit alors une attestation de nationalité, peut solliciter un passeport béninois, et transmettre cette nationalité à ses enfants mineurs, contribuant ainsi à une réintégration progressive des familles afro-descendantes dans le tissu socio-juridique béninois.
Un enjeu stratégique et symbolique fort
Le rapport de la Commission des lois a mis en exergue l’importance stratégique de cette réforme. Au-delà de la simplification administrative, il s’agit d’un acte politique fort à l’égard de la diaspora noire, en particulier les descendants d’Africains déportés lors de la traite transatlantique. Le Bénin, ancien royaume de départs de captifs, assume ainsi une responsabilité historique en posant les bases d’un retour symbolique et juridique des enfants de la diaspora.
En facilitant ce processus, le gouvernement béninois entend également renforcer sa politique d’ouverture et de coopération avec la diaspora, considérée comme un levier essentiel de développement, de rayonnement culturel et de diplomatie économique.
Un modèle à suivre ?
Avec cette loi, le Bénin propose un modèle inclusif et progressiste de l’attribution de la nationalité fondé sur la reconnaissance, la mémoire et la souveraineté nationale. Ce geste législatif s’inscrit dans une dynamique plus large de réappropriation identitaire, amorcée depuis plusieurs années avec la célébration des racines africaines, la restitution des biens culturels et la promotion du tourisme mémoriel.
Des voix s’élèvent déjà pour inviter d’autres pays africains à emboîter le pas, et à proposer, à leur tour, un cadre légal permettant aux Afro-descendants de renouer formellement avec leur terre d’origine.
En somme, cette réforme marque un tournant historique dans la manière dont le Bénin redéfinit son identité nationale à l’heure de la mondialisation. Elle symbolise l’ouverture d’un pont entre le pays et ses fils éloignés, avec à la clé une promesse : celle d’un avenir partagé, enraciné dans une histoire commune et porté par une citoyenneté réconciliée.
Boris MAHOUTO