Mali, les ex-rebelles du nord changent de nom, vers un virage indépendantiste ?
On entendait plus tellement parler d’eux depuis que l’armée malienne et le groupe paramilitaire russe Wagner ont repris de leurs mains en novembre 2023 la ville de Kidal dans le nord du Mali… les ex rebelles du nord viennent de changer officiellement de nom. Pour quels objectifs?
Les ex-rebelles du nord du Mali se sont dits lundi « en temps de guerre » avec la junte au pouvoir à Bamako, dans un communiqué reçu par l’AFP et diffusé sur les réseaux sociaux.
Dans ce communiqué intitulé « communication en temps de guerre » et authentifié par un porte-parole, la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA), alliance de groupes à dominante touareg qui a combattu l’Etat central avant de signer un accord de paix avec lui en 2015, appelle « tous les habitants de l’Azawad à se rendre sur le terrain pour contribuer à l’effort de guerre dans le but de défendre et protéger la patrie, et ainsi de reprendre le contrôle de l’ensemble du territoire national azawadien ».
Des insurrections indépendantistes et salafistes ont alors plongé ce pays pauvre et enclavé dans une profonde crise sécuritaire, politique et humanitaire dont il n’est toujours pas sorti.
Si les groupes à dominante touareg ont accepté un cessez-le-feu en 2014, les jihadistes ont poursuivi le combat contre l’Etat central et toute présence étrangère sous la bannière d’Al-Qaïda et de l’organisation Etat islamique. La propagation jihadiste a gagné le centre du pays, le Burkina Faso et le Niger voisins.
Dans les vastes étendues désertiques ou semi-désertiques du nord, ainsi que les régions de Tombouctou et Gao, les rivalités se sont intensifiées ces dernières semaines entre la multitude d’acteurs armés se disputant le contrôle du territoire: groupes jihadistes contre armée malienne, groupes jihadistes entre eux, groupes armés touareg contre jihadistes, et groupes touareg face à l’armée malienne.
Elles ont donné lieu à une succession d’attaques, d’incidents sécuritaires et d’accrochages entre l’armée et la CMA.
Dans son communiqué qui se veut le premier communiqué de « l’Armée nationale azawadienne », la CMA se garde de parler de déclaration de guerre, mais évoque une « riposte en légitime défense » à ce qu’elle appelle « l’agression » de l’armée malienne et du groupe paramilitaire russe Wagner.
Les militaires qui ont pris le pouvoir par la force en 2020 au Mali sont très largement considérés s’être assuré les services de Wagner, malgré leurs démentis.
- Couvre-feu –
La CMA accuse l’armée d’avoir bombardé ses positions mais aussi des civils, et les soldats maliens et les mercenaires de Wagner de s’être livrés à des exactions contre les populations. Elle les accuse de « crimes de guerre » et de « crimes contre l’humanité ».
Elle appelle les civils à rester à distance des positions des « terroristes » de l’armée malienne et de Wagner.
Cette escalade coïncide avec une reconfiguration sécuritaire dans le Nord après le départ de la force antijihadiste française en 2022 et celui, en cours, de la mission de l’ONU (Minusma), toutes deux poussées vers la sortie par la junte.
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La CMA n’entend pas que la Minusma rétrocède ses camps aux autorités maliennes, comme elle l’a fait en août à Ber, près de Tombouctou. Elle estime qu’en vertu des arrangements de 2014 et 2015, ces zones devraient revenir sous son contrôle.
La junte a fait du rétablissement de la souveraineté un de ses mantras, un objectif qui se heurte aux différents groupes armés, qui contrôlent de vastes étendues de territoire.
La CMA a affirmé samedi soir avoir abattu un avion de l’armée après un bombardement sur ses positions dans la région de Gao. Il s’agirait d’un acte inédit depuis des années. L’état-major a assuré pour sa part que l’appareil s’était écrasé à cause de problèmes techniques, mais que son équipage avait réussi à s’éjecter.
Mali: les ex-rebelles du nord se disent « en temps de guerre » avec la junte
Des combattants touaregs de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) près de Kidal, dans le nord du Mali, le 28 septembre 2016 / AFP/Archives.
Les jihadistes exercent eux aussi une forte pression. Une double attaque qui leur est imputée, dont l’une contre un bateau de passagers sur le fleuve Niger, a tué au moins 64 personnes, dont des dizaines de civils jeudi entre Tombouctou et Gao, selon un bilan gouvernemental.
Tombouctou est soumise depuis août à un blocus du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM), alliance affiliée à Al-Qaïda. Des obus sont tombés lundi sur l’aéroport de Tombouctou. La compagnie Sky Mali a annoncé suspendre ses vols de et vers Tombouctou et Gao cette semaine, aggravant l’isolement des grandes villes du Nord.
Après le gouvernorat de Gao ce week-end, celui de Tombouctou a décrété un couvre-feu nocturne reconductible de 30 jours jusqu’au 10 octobre de 20H00 à 6H00 (locales et GMT).