Du 18 au 21 mai 2025, le président béninois Patrice Talon posera ses valises à Doha pour une visite de travail à haute portée stratégique. Trois jours durant, le chef de l’État et sa délégation feront la courbe des salons feutrés de l’émirat, entre rendez-vous de haut niveau, signatures d’accords et vitrine économique mondiale qu’est le Qatar Economic Forum. Objectif : hisser les relations bénino-qataries à un niveau inédit et attirer vers Cotonou un flux d’investissements capable de transformer durablement l’économie nationale.
Point d’orgue du séjour : la cérémonie d’ouverture de la sixième édition du Qatar Economic Forum (QEF), le 19 mai. Invité d’honneur de l’émir Tamim bin Hamad Al Thani, Patrice Talon rejoindra sur scène des PDG du Fortune 500, des fonds souverains du Golfe, ainsi qu’une poignée de décideurs africains triés sur le volet. Croissance verte, chaînes de valeur industrielles, financement des infrastructures et transition numérique composeront l’essentiel des panels auxquels le président béninois est attendu. Un agenda millimétré et rempli, visiblement assorti d’opportunités pour le pays.
En marge du forum, le locataire du Palais de la Marina s’entretiendra avec l’émir au Amiri Diwan. Les deux hommes devraient parapher plusieurs instruments juridiques : un accord de promotion et de protection réciproque des investissements, un mémorandum de coopération dans les énergies renouvelables et un protocole sur la formation technique des jeunes Béninois. À la clé, la perspective d’un guichet financier qatari dédié aux projets portuaires de Sèmè-Kraké et au développement de la Zone économique spéciale de Glo-Djigbé.
*Une diplomatie économique assumée*
Depuis 2016, Patrice Talon a fait de la diplomatie économique le bras armé de son Programme d’action du gouvernement (PAG). Après la Corée du Sud, l’Arabie saoudite et l’Union européenne, c’est au tour du Qatar d’être courtisé. Intérêt bien compris : l’émirat investit massivement en Afrique de l’Est et lorgne l’ouest du continent pour diversifier son portefeuille hors hydrocarbures. Le Bénin, avec sa stabilité politique, son taux de croissance projeté à 6,3 % en 2025 et son ambitieux plan d’industrialisation, se présente comme un partenaire crédible.
*Opportunités croisées*
Les milieux d’affaires qataris scrutent déjà les secteurs béninois de l’agro-industrie, du tourisme balnéaire et de la logistique portuaire. Doha, de son côté, espère ouvrir à ses entreprises de nouveaux débouchés en Afrique de l’Ouest, sécuriser des approvisionnements en denrées agricoles et positionner ses géants de la construction sur les chantiers béninois. Les discussions devraient également porter sur la connectivité aérienne : la compagnie Qatar Airways envisage de tester une liaison Doha-Cotonou via Lagos, ce qui placerait le Bénin à sept heures de vol du Golfe.
*Au-delà des affaires : culture et soft power*
La visite inclut un passage au Qatar National Museum, écrin architectural signé Jean Nouvel. Symbolique, l’étape rappelle que la coopération ne se limite pas aux chiffres. Côté béninois, la restitution récente d’objets royaux d’Abomey et l’émergence d’une filière culturelle offrent un terrain de dialogue sur la sauvegarde du patrimoine et l’économie créative. Un volet boursier pourrait voir le jour, le Qatar s’étant engagé à soutenir la construction du futur Musée de l’épopée des Amazones.
*Un pas de plus vers la diversification des partenaires*
En choisissant Doha, Cotonou envoie un signal clair : la diplomatie béninoise poursuit sa diversification, refusant tout enfermement dans des têtes-à-tête traditionnels. Si la visite tient ses promesses, elle ouvrira une passerelle stratégique entre le golfe de Guinée et celui d’Arabie, au bénéfice d’une intégration accrue du Bénin dans le commerce mondial.
Rendez-vous est donc pris, du 18 au 21 mai 2025, pour mesurer la portée des signatures et la réalité des annonces. Les projecteurs du Qatar Economic Forum offriront au Bénin une vitrine inédite ; reste à transformer l’essai pour que les promesses de Doha irriguent concrètement les rives du littoral béninois.
Boris MAHOUTO