À mesure que l’échéance électorale de 2026 approche, le climat politique national s’électrise autour du duo de candidature annoncé par la mouvance présidentielle. Alors que les tractations se multiplient et que la société civile, la diaspora et les partis alliés font entendre leur voix, certaines figures emblématiques de la scène politique béninoise choisissent, pour l’heure, de rester silencieuses. Un silence qui intrigue autant qu’il interroge.
Des voix muettes mais lourdes de sens
Parmi ces acteurs majeurs, on retrouve des noms qui, hier encore, occupaient les premières loges de l’arène politique : Nicéphore Dieudonné Soglo, premier président démocratiquement élu de l’ère du Renouveau, connu pour ses sorties souvent tranchantes ; Adrien Houngbèdji, ancien président de l’Assemblée nationale et figure historique du Parti du Renouveau Démocratique (PRD) ; Bruno Amoussou, patriarche de la droite béninoise et longtemps stratège influent du Bloc Républicain ; Joseph Gnonlonfoun, juriste reconnu et ancien président de la Cour Suprême, ancien médiateur de la République ; Valentin Aditi Houdé, homme politique au franc-parler très redouté ; Candide Azannaï, connu pour ses prises de position radicales et ses ruptures fracassantes avec le pouvoir ; Mathurin Coffi Nago, ex-président de l’Assemblée nationale et acteur de premier plan des recompositions politiques des vingt dernières années. Tous, des cadors de la scène politique nationale, n’ont pour l’instant émis aucun commentaire sur la dynamique en cours, ni sur le duo porté par la mouvance présidentielle.
Le poids d’un silence stratégique
Dans un pays où chaque déclaration d’un ancien président, d’un ex-président de l’Assemblée ou d’un chef de parti peut réorienter les équilibres, ce mutisme intrigue. Est-ce le signe d’une neutralité volontaire pour ne pas alimenter la polémique ? Un calcul politique dans l’attente d’un rapport de force plus clair ? Ou encore une manière de préserver leur capital d’influence en gardant une posture d’observateurs distants ?
Leur silence n’est pas anodin : il reflète, pour certains analystes, un malaise vis-à-vis de la configuration politique actuelle, où la mouvance concentre l’essentiel des leviers de décision. Pour d’autres, il s’agit d’une attitude d’attente : ces personnalités savent que leur parole, lorsqu’elle tombera, pourrait avoir l’effet d’un séisme.
Une mémoire politique encore vivace
Même en retrait, ces hommes restent des références dans la mémoire collective. Ils symbolisent des époques différentes de la démocratie béninoise et leurs positions peuvent encore influencer des pans entiers de l’opinion. L’histoire récente l’a montré : au Bénin, aucun grand scrutin ne se joue sans tenir compte de la posture des anciens poids lourds ou encore des grands électeurs, pour reprendre l’expression collée au système électoral américain.
La mouvance présidentielle sous observation
Du côté de la mouvance présidentielle, ce silence est accueilli avec prudence. D’un côté, il pourrait traduire une absence d’opposition frontale, ce qui serait une victoire tacite. Mais de l’autre, il laisse planer l’incertitude sur d’éventuelles déclarations futures capables de rebattre les cartes, surtout si ces leaders choisissent de se positionner du côté de l’opposition ou d’appeler à un vote protestataire.
Une scène politique à plusieurs vitesses
À l’heure actuelle, la scène politique béninoise semble fonctionner à deux vitesses : d’un côté, une mouvance présidentielle qui structure sa stratégie autour de son ticket, et de l’autre, une opposition encore en quête de boussole, mais qui pourrait trouver un souffle nouveau si ces voix longtemps muettes venaient à rompre le silence.
Boris MAHOUTO