Des agents du ministère de l’Intérieur mis en cause, une affaire de plusieurs millions de francs CFA en jeu, le leader du parti interpellé… La Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (CRIET) s’est saisie d’un dossier qui suscite déjà de nombreuses interrogations sur les pratiques autour de la reconnaissance officielle des partis politiques au Bénin.
Le procureur spécial près la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (CRIET), Mario Mètonou, a livré ce vendredi des précisions troublantes sur l’affaire dite du « récépissé provisoire du Parti Le Libéral », formation politique dirigée par Richard Boni Ouorou.
*Des versements en plusieurs tranches*
Au cœur de ce dossier, des allégations de corruption impliquant des fonctionnaires du Ministère de l’Intérieur et de la Sécurité Publique. Selon les éléments révélés par le procureur, une somme de 12 millions de francs CFA aurait été initialement proposée pour faciliter l’obtention du récépissé provisoire du parti « Le Libéral ».
Le Directeur des Partis Politiques et des Affaires Électorales (DPPAE), interpellé dans le cadre de l’enquête, reconnaît avoir reçu 5 millions de francs CFA, somme retrouvée à son domicile lors d’une perquisition. Il affirme avoir refusé les 7 millions restants.
Toutefois, le président du parti, Richard Boni Ouorou, affirme avoir versé 7 millions de francs CFA, en trois tranches : 1 million de FCFA avant le congrès du parti le 5 avril 2025, puis 2 versements de 3 millions de FCFA les 26 et 28 avril.
*Une procédure entachée de soupçons*
Ces révélations jettent une ombre sur le processus de reconnaissance officielle des partis politiques au Bénin. D’après le procureur, les versements auraient été effectués en contrepartie de l’intervention des agents impliqués pour faciliter l’aboutissement du dossier administratif du parti.
Le parquet spécial estime que les faits établis constituent des actes de corruption d’agents publics, délit prévu et réprimé par les articles 335 et suivants du code pénal béninois. La peine encourue est lourde : de 5 à 10 ans de réclusion criminelle, assortie d’amendes et de confiscations.
*Un message fort du parquet*
Dans son adresse à la presse, Mario Mètonou a tenu à rappeler que ni la sollicitation répétée d’un agent public, ni les pressions exercées ne sauraient justifier un acte de corruption : « Céder aux sollicitations d’un agent public et lui faire des dons vous rend coupable de corruption au même titre que lui. » Il a également invité la population à dénoncer de tels actes lorsqu’elle en est témoin ou victime, réaffirmant la détermination de la CRIET à lutter sans relâche contre la corruption sous toutes ses formes.
*Des arrestations déjà effectuées*
Dans le cadre de l’enquête, plusieurs agents publics ont été interpellés, dont le Directeur des Partis Politiques et un cadre de la Direction des Affaires Intérieures et des Cultes. Richard Boni Ouorou a quant à lui été arrêté le jeudi 15 mai 2025 au soir.
L’affaire suit son cours, et les enquêtes se poursuivent pour établir toutes les responsabilités. Elle relance en tout cas le débat sur la transparence dans la gestion administrative et politique au Bénin, à un moment où la réforme du système partisan continue de susciter critiques et remous.
Boris MAHOUTO