C’est une démission qui ne laisse pas indifférent sur la scène politique béninoise. Alain Adihou, ancien ministre de l’ère Kérékou et figure influente de la Force Cauris pour un Bénin Émergent (FCBE), a officiellement quitté le parti après plusieurs mois de mise à l’écart. Dans une interview exclusive accordée à Africaho, le désormais ex-camarade de Paul Hounkpè revient sans détour sur les raisons de son départ, dénonce un climat de défiance interne et s’interroge sur la place réelle de la FCBE dans l’opposition béninoise.
Contrairement à ce que laisse croire la lettre de suspension diffusée par le Bureau Exécutif National (BEN), Alain Adihou affirme qu’il s’était déjà retiré depuis mai 2024. Sa dernière participation à une réunion du bureau remonte au 28 juin de la même année. Depuis, plus rien. Aucune convocation, aucune concertation, aucun échange. « Je me suis retiré parce qu’il y avait un malaise. Depuis ma déclaration du 14 mars 2024 sur l’alliance possible entre les maires FCBE et les députés des Démocrates, j’ai senti que j’étais devenu une cible. Pourtant, cette déclaration avait suscité un véritable enthousiasme dans l’opinion publique. Mais à l’intérieur du parti, elle a été perçue comme une menace pour certains intérêts », confie-t-il.
*Le « groupe des dix » et la défiance interne*
Au cœur du malaise, Alain Adihou évoque l’existence d’un groupe informel et non statutaire au sein du BEN, surnommé le groupe des dix. Ce cercle restreint, selon lui, aurait vu d’un mauvais œil son positionnement jugé trop affirmé sur la scène politique. « C’est comme si ma déclaration dérangeait leur ‘boufferie’. Le Secrétaire exécutif national n’a pas su ou voulu apaiser les tensions. Face à cette inertie, j’ai préféré me retirer en silence. »
Ce silence a duré presque un an. Mais tout s’est accéléré le 6 mai 2025 lorsqu’il reçoit une lettre de suspension provisoire pour « manquements graves ». Une décision qu’il juge floue et injustifiée. « J’ai demandé qu’on me précise ces fautes. Aucune réponse. J’ai donc pris la décision d’officialiser mon départ. »
*Une opposition fragmentée, un homme en quête de clarté*
Alain Adihou ne se reconnaît plus dans la trajectoire actuelle de la FCBE, ni même dans celle de certains partis de l’opposition. « Je ne suis pas Les Démocrates. Il y a aussi des choses à leur reprocher. L’opposition ne devrait pas être réduite à un seul bloc ou à une seule ligne. »
Refusant toute étiquette partisane désormais, il se revendique comme un homme politique libre, attaché aux valeurs héritées de son mentor, le général Mathieu Kérékou. « C’est lui qui m’a façonné. Ma crédibilité politique vient de là. Je tiens à la préserver. »
*L’avenir politique d’Alain Adihou : entre réserve et disponibilité*
Quant à son avenir, Alain Adihou reste énigmatique, tout en laissant la porte entrouverte à diverses collaborations. « Je ne suis pas de la mouvance, mais je ne suis fermé à personne. Si une force politique, même de la majorité, souhaite bénéficier de mon expertise, je suis prêt à réfléchir avec elle. Mais je reste fondamentalement dans l’opposition, parce que je ne partage pas les orientations du régime en place, notamment cette obsession de l’argent au détriment des valeurs humaines. »
*Une rupture sans fracas, mais non sans message*
Pas de guerre ouverte, assure-t-il. Pas d’attaques personnelles. Mais un message clair : l’opposition a besoin de cohérence, de clarté et de courage. En se retirant de la FCBE, Alain Adihou entend marquer une rupture avec les pratiques politiciennes internes et affirmer une posture éthique, centrée sur l’intérêt général.
Son départ résonne comme un signal d’alarme : les partis d’opposition risquent de se vider de leur substance s’ils ne réconcilient pas leurs ambitions personnelles avec l’exigence d’un projet politique crédible. Reste à savoir si sa voix portera au-delà de la FCBE… et jusqu’où.
Alain Adihou brise le silence après sa démission de la FCBE : révélations d’un malaise profond au sein du parti
