Le dynamisme diplomatique du Bénin a trouvé un nouveau terrain d’expression dans la capitale grand-ducale. En première ligne : Romuald Wadagni, ministre béninois de l’Économie et des Finances, et Olushegun Adjadi Bakari, chef de la diplomatie. Leur mission ? Convertir la réputation grandissante du pays en accords concrets, capables d’accélérer la transition économique et écologique engagée depuis 2016.
Luxembourg, deuxième centre financier mondial pour les fonds d’investissement, apporte un levier déterminant : accès direct aux marchés de capitaux verts — La Bourse de Luxembourg, pionnière des obligations durables, accompagnera le Bénin pour structurer de nouveaux « Benin Sustainability Bonds ». Objectif : financer des infrastructures sobres en carbone (solaire, assainissement, mobilité urbaine) tout en respectant la taxonomie européenne. Un pont financier Nord-Sud bâti sur la confiance.
Partage de bonnes pratiques réglementaires — L’Institut luxembourgeois de régulation financière (CSSF) et le Trésor béninois mettront en place un cadre de formation croisée pour consolider la transparence budgétaire et attirer les investisseurs soucieux d’impact. « Le Bénin fait la démonstration qu’une politique réformatrice crédible attire des capitaux patientes. Nous voulons en faire la vitrine ouest-africaine de la finance responsable », a résumé Gilles Roth, ministre luxembourgeois des Finances.
*Le programme StarVenture : turbo-booster des start-ups béninoises*
Point d’orgue de la visite : la signature d’un protocole tripartite Luxembourg–BERD–Bénin. Elle prévoit le déploiement du programme StarVenture sur trois ans : Mentorat de haut niveau (Coaching par des entrepreneurs européens et africains aguerris, 120 jeunes pousses); expertise sectorielle (diagnostic stratégique, propriété intellectuelle, mise à l’échelle, 60 scale-ups); tickets de financement flexibles (prêts convertibles, garanties de première perte, co-investissements, 100 M€ mobilisables)
Outre l’accompagnement, un laboratoire d’open-innovation « BenLux Lab » verra le jour à Cotonou pour connecter start-ups locales et fintech luxembourgeoises autour de la blockchain inclusive et des paiements transfrontaliers.
*Tourisme et capital humain : des synergies inattendues*
Le Luxembourg parie aussi sur le tourisme culturel du Bénin — berceau du vodoun, fort d’un littoral encore préservé et de sites classés. Un Fonds d’ingénierie touristique (10 M€ de dotation initiale) financera : la réhabilitation du circuit historique Ouidah-Abomey, la formation de guides multilingues, l’essor de l’écotourisme autour du lac Ahémé et de la Pendjari. Cette approche holistique renforce le capital humain : des bourses d’excellence seront créées pour des masters franco-luxembourgeois en finance durable, hôtellerie et sciences des données.
*Une diplomatie économique de rupture*
Pour Cotonou, l’équation est claire : Réformes structurelles + Partenariats ciblés = Souveraineté financière accrue. La stratégie béninoise s’éloigne des schémas d’assistance traditionnels : elle privilégie la co-construction d’outils (fonds, hubs, incubateurs) et la coparticipation au risque plutôt que les dons sans effet de levier.
Romuald Wadagni résume ainsi l’esprit de cette nouvelle ère : « Notre génération refuse la fatalité. Nous proposons aux investisseurs un deal clair : stabilité, transparence, impact mesurable. Le Luxembourg a saisi la main tendue ; d’autres partenaires suivront. »
*Un signal continental*
Dans un contexte où l’Afrique capte à peine 3 % des flux mondiaux de finance verte, l’accord Benin–Luxembourg envoie deux messages : aux marchés : les économies africaines réformatrices sont prêtes pour la finance climat et l’innovation de rupture; aux États africains : la diplomatie économique peut dépasser la quête d’aides pour devenir un art d’alliances stratégiques, équilibrées et co-bénéfiques.
En misant sur un partenariat sophistiqué avec le Luxembourg, le Bénin confirme son virage vers un modèle de développement centré sur l’entrepreneuriat, la finance durable et la valorisation de son patrimoine. Plus qu’un accord, c’est une feuille de route qui positionne Cotonou comme un laboratoire de la coopération euro-africaine de nouvelle génération : ambitieuse, inclusive et ancrée dans la réalité des marchés globaux.
Boris MAHOUTO