L’annonce, bien que prévue par la Constitution, marque un tournant dans l’histoire politique du Togo. Retour sur les faits et les véritables enjeux d’une démission à la fois institutionnelle et symbolique.

C’est une page qui se tourne. La Première ministre Victoire Tomégah Dogbé a présenté ce vendredi 2 mai sa démission et celle de son gouvernement au président de la République, Faure Essozimna Gnassingbé. Ce geste, bien qu’anticipé dans le cadre du passage à la Vᵉ République, n’en demeure pas moins hautement significatif.
*Une démission dictée par la nouvelle Constitution*
Cette décision intervient dans la droite ligne des dispositions transitoires prévues par la nouvelle Constitution togolaise, promulguée le 6 mai 2024. Le texte fondateur de la Vᵉ République instaure un système parlementaire, en rupture avec le régime présidentiel antérieur. Il prévoit une période transitoire de douze mois, au cours de laquelle les institutions actuelles doivent se réajuster aux nouvelles règles du jeu politique.
La démission de Victoire Tomégah Dogbé n’est donc pas une surprise : elle était inscrite dans la logique de mise en œuvre de la nouvelle architecture institutionnelle. Toutefois, au-delà du cadre juridique, cette annonce soulève des interrogations sur la recomposition politique en cours et les équilibres à venir.
*Un mandat marqué par la rigueur et la discrétion*
Nommée le 28 septembre 2020, Victoire Tomégah Dogbé est entrée dans l’histoire du Togo comme la première femme à occuper la fonction de Premier ministre. À 65 ans, cette technocrate issue des rangs du PNUD aura su imposer un style de gouvernance basé sur la discipline, le pragmatisme et la gestion orientée résultats.
Si son passage à la Primature n’a pas été tapageur, il a été ponctué de réformes dans les secteurs clés : digitalisation de l’administration, développement de l’entrepreneuriat des jeunes, renforcement de l’action sociale. Elle a également piloté la réponse gouvernementale face à la pandémie de Covid-19 et ses effets socio-économiques.
*Faure Gnassingbé salue une « femme d’engagement »*
Dans un communiqué officiel, le président de la République a salué « le travail remarquable » de Victoire Dogbé et de son équipe, en mettant en avant « son sens de l’État, son intégrité et son engagement au service de la Nation ». Il leur a toutefois demandé d’assurer la gestion des affaires courantes jusqu’à la mise en place d’un nouveau gouvernement, conformément aux usages républicains.
*Et maintenant ? Les regards tournés vers l’Assemblée*
Dans le nouveau régime parlementaire, c’est l’Assemblée nationale qui détient le pouvoir de désigner un chef du gouvernement. Cette transition annonce une redistribution des cartes politiques, avec un renforcement du rôle des partis représentés au Parlement.
La démission du gouvernement Dogbé n’est donc que la première étape d’un processus plus large de refondation institutionnelle. Elle ouvre également une période d’intenses tractations politiques en coulisses, où l’équilibre entre fidélité présidentielle et nouvelle légitimité parlementaire sera déterminant.
*Une fin ? Ou un nouveau rôle pour Victoire Dogbé ?*
Si certains voient dans cette démission la fin d’un cycle pour Victoire Tomégah Dogbé, d’autres parient sur sa reconversion politique dans le nouveau paysage institutionnel. Forte de son expérience et de sa stature, elle pourrait jouer un rôle de premier plan dans les mois à venir, dans ou hors du gouvernement.
Quoi qu’il en soit, son passage à la tête du gouvernement restera une étape marquante dans l’histoire politique contemporaine du Togo — une période de transition gérée avec fermeté dans un contexte de transformation profonde.
CMM